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Les délibérations par lesquelles le Conservatoire du Littoral classe ses dépendances dans le domaine public doivent être publiées pour être exécutoires

Auteur : Ismaël TOUMI
Publié le : 09/12/2016 09 décembre déc. 12 2016


Conseil d’Etat 5 décembre 2016, Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, n° 398659


Par un arrêt du 5 décembre 2016, le Conseil d’Etat juge que le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (plus communément dénommé Conservatoire du littoral) n'est pas dispensé de publier ses délibérations pour leur donner caractère exécutoire.

Ayant acquis à l’amiable la propriété d’un domaine composé de terres agricoles en Camargue, le Conservatoire du littoral a entrepris de classer cette propriété dans son domaine propre, c’est-à-dire dans la partie de ses biens relevant du domaine public, afin de pouvoir expulser un fermier en place depuis de longue date, et qui exploitait le domaine selon un bail rural très avantageux.

Pour cela, le Conservatoire du littoral a délibéré en conseil d’administration, le 21 novembre 2013, et transmis cette délibération au ministre de l’environnement, comme le prévoit l’article R. 322-28 du code de l’environnement.

L’établissement public a ensuite proposé une convention d’occupation précaire à l’occupant des lieux, qui n’avait pas de bail écrit. Mais celui-ci a décliné cette proposition, l'estimant exorbitante.

Le Conservatoire du littoral a alors réclamé au Juge des référés du tribunal administratif de Marseille l’expulsion sous quinzaine du fermier, qu’il présentait comme étant occupant sans droit ni titre du domaine public.

Plusieurs arguments étaient présentés en défense au juge des référés.
En premier lieu, le fermier en place estimait que la délibération du 21 novembre 2013 n’était pas exécutoire, faute de lui avoir été notifiée, d’avoir été publiée, ou affichée.
En second lieu, il avait saisi le tribunal paritaire des baux ruraux compétent afin que soit tranchée l’existence d’un bail rural verbal antérieur à l’acquisition des terres par le Conservatoire du littoral.

Le juge des référés a écarté le premier moyen, et s’est fondé sur le second, estimant que la saisine du Tribunal paritaire des baux ruraux constituait une contestation sérieuse excluant que le fermier, en place depuis plus de vingt ans, soit expulsé selon une procédure d'urgence.
Le conservatoire du littoral s’est alors pourvu en cassation devant le Conseil d’Etat contre cette ordonnance.
Faisant usage de ses pouvoirs d’instruction, le Conseil d’Etat a demandé à l’établissement public de justifier des mesures de publicité de sa délibération du 21 novembre 2013 de nature à la rendre exécutoire. Le Conservatoire du littoral s’est alors borné à rappeler, comme il l’avait fait devant le juge des référés, que ses délibérations n’avaient pas à être publiées pour acquérir un caractère exécutoire, leur seule transmission au ministre de tutelle (le ministre de l’environnement) suffisant à cet égard, en application de l’article R. 322-28 précité.

Par un arrêt du 5 décembre 2016, le Conseil d’Etat a réfuté cette analyse.
La haute juridiction a tout d'abord annulé l’ordonnance de référé, en tant qu’elle s’était fondée sur le moyen pris de la saisine du Tribunal paritaire des baux ruraux.

Puis, réglant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat a rejeté la requête aux fins d’expulsion. Il a pour cela jugé que la délibération du 21 novembre 2013 portant classement dans le domaine public n’ayant reçu aucune mesure de publicité, elle n’était dès lors pas entrée en vigueur, et que les terres en cause ne pouvaient être considérées comme une dépendance du domaine public.

L’affaire reste pendante devant le tribunal paritaire des baux ruraux quant au sort du bail rural.
 

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